Réflexions passagères ...
La patrie, cet objet obscur …
Dernièrement, selon Telquel (n° 245), je cite : "32 candidats marocains au hrig sont partis de Tarfaya en direction des Iles Canaries. Quelques heures plus tard, ils ont brandi, à la vue de la Guardia civil qui s'apprêtait à les arrêter, des drapeaux du Polisario! Il semblerait que cette nouvelle technique (se faire passer pour un polisarien pour éviter le refoulement vers le Maroc) fasse des émules puisque deux jours plus tard, 23 autres harraga ont suivi le même exemple. "Ce sont pas forcément des sahraouis, souligne cette source, mais ils savent qu'avec la carte de l'indépendiste réprimé, ils ont plus de chance d'obtenir l'asile politique". Et le patriotisme alors?
Il y a dans assentiment à la réalité des choses un éternel principe à la vie qui assaille chaque être humain, au risque de la perdre. Le pays d'origine – natal-, ce lieu qu-on n'a pas choisi, n'exerce plus cette contrainte telle qu'elle empêche qu'on en prenne conscience. Sa géographie pour les uns, une minorité qui joue à la comédie d'aimer ce pays et sa sacro-sainte cause, représente un ancrage sécurisant, sinon une sinécure. Alors que pour les autres, la majorité, ils ne ressentent cette géographie que comme une limitation, un enfermement, comme une dépendance qui, au fur et à mesure qu'augmentent leur volonté de s'en dépendre, assiègent et hantent le "vide" de leurs personnes, de leur citoyenneté et la déterminent négativement…
Comment habiter alors sa patrie? Malencontreusement pour les jeunes marocains, on ne peut qu'y revenir, sinon, c'est la nécessité de partir qui domine. Ils aimeront eux aussi leur patrie quand ils en seront loin; pour le moment, ils déclarent la "haïr" parce qu'ils y sont. Dans cette tragique séparation, quelque chose s'y précipite, s'y dépasse et s'y déplace, dont ces jeunes démoralisés ne sauraient être absolument maître, Ils vivent cette solitude violente comme un arrachement et une libération désirables. L'immigration avec ce genre de subterfuge ne peut que laisser pensif sur la question de l'identité : quelle affinité, quelle plus singulière et invisible raison déterminent l'attachement à une patrie? Quand est-ce que cette patrie deviendra un signe qui correspond à quelque chose d'authentique et de vivant en nous? Ce signe ne sera vide cependant que quand ne pas partir vaut mieux que partir, dans l’urgence…
Aljazeera, subliminale imagerie
Au pays des kangourous, un mufti égyptien, Sheik Taj Al-Din Al-Hillali, a fini par défrayer la chronique; selon qui, verbatim dans le Time Magazine, "If you take out uncovered meat and place it outside on the street or in the garden or in the park or in the backyard without a cover, and the cats come and eat it, whose fault is it – the cats' or the uncovered meat?". Je vous épargne les implications morales et le tollé officiel et publique suscités par ces dires…Au-delà de cet incident, somme toute condamnable, la couverture par Al-jazeera, je ne sais pas si vous l'avez vu, en rajoute une couche…Je m'explique. Souvent dans les médias occidentaux, quand on parle des musulmans, preuves à l'image, ils sont représentés barbus,quelques fois l'habit jihadiste, vacant à leurs prières dans la rue publique, alors que les musulmans ne sont pas tous, loin de là, barbus et une quantité non négligeable ne s'appliquent pas au devoir orthodoxe de la prière La chaîne qatariote a fait mieux dans ce genre de sémiotique biaisée : en évoquant l'incident, elle a joint, toujours en images, le stéréotype occidental à l'arrière-pensée musulman, en guise de message subliminal. En plus des musulmans barbus, on a eu droit aux bikinis lolitas et autres bouts de femmes en train de lézarder et trémousser paisiblement sur les plages si célèbres d'Australie
En fait, ce genre d'a priori télévisuelle ne fait que corroborer le dogme tant sempiternel, selon lequel tous les musulmans seraient des épigones de la morale immaculée – avec cette fameuse HIDAYA ontologique à la charge-, face à ces occidentaux ou occidentales qui pataugent dans la dissolution des mœurs à force d'être tellement dévêtus, et bien sûr enclins à une lubricité débridée…
Bien des fois, Al-jazeera ne fait que vomir avec application la langue du village, danser le folklore. Loin de l'ouverture de l'esprit et des idées honnêtes, elle en donne seulement le spectacle, la forme vidée. Bien évidemment, l’Imam ne peut qu’exulter...
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